Les cuivres dans
La Nuit des rois
Les partitions des Ballades de Schumann recèlent plus d’une surprise en ce qui concerne leur instrumentation. Les cuivres y font ainsi l’objet d’un traitement tout particulier. Les musiciens d’Insula orchestra font le point sur les instruments qu’ils ont utilisés lors des productions de La Nuit des rois.
Cors – par Georg Koehler
Schumann a certainement été ébloui par les possibilités harmoniques de ce nouvel instrument et a composé quelques œuvres très virtuoses pour cor chromatique. En même temps, il ne souhaitait pas abandonner complètement le cor naturel et son timbre caractéristique.
Au cours du XIXe siècle, la transition entre les cors naturels et les cors à pistons s’opère au sein des orchestres allemands. Schumann a certainement été ébloui par les possibilités harmoniques de ce nouvel instrument et a composé quelques œuvres très virtuoses pour cor chromatique (par exemple, l’Adagio und Allegro, op. 70, pour cor et piano, et surtout le Konzertstück, op. 86, pour quatre cors et orchestre). En même temps, il ne souhaitait pas abandonner complètement le cor naturel et son timbre caractéristique.
Dans les ballades, il requiert expressément deux cors à pistons [Ventilhorn] et deux cors naturels [Waldhorn]. Dans ce cas précis, l’expression Waldhorn est équivalente à Naturhorn, cor naturel ; Brahms use de la même terminologie. Chez Schumann, on retrouve la même disposition mêlant cors à pistons et cors naturels dans la Symphonie no 3, op. 97, et la Symphonie no 4, op. 120, dans la version révisée de 1851.
Au XIXe siècle, en ce qui concerne la perce [Mensur] et donc le timbre qui en résulte, il faut distinguer entre les cors français (perce étroite au voisinage de la branche d’embouchure et son clair et coloré) et les cors autrichiens ou bohémiens (perce plus large, son plus sombre et homogène). Les instruments allemands se sont plutôt orientés vers un timbre autrichien / bohémien.
Pour La Nuit des Rois, Yannick Maillet et Cédric Muller ont utilisé les deux cors naturels de l’orchestre : des copies d’instruments d’Anton Kerner (Vienne, 1810), réalisée par Stefan Katte.
J’ai joué un cor dit « viennois » d’Andreas Jungwirth (Freichling, 2021). En principe, ce type d’instrument, avec sa facture unique (ton d’accord comme branche d’embouchure, comme sur le cor naturel ; pistons viennois [Doppelpumpenventile] excentrés par rapport au corps de l’instrument), n’a pas connu de transformation depuis le XIXe siècle, mais est encore utilisé de nos jours en Autriche et surtout à Vienne (il s’agit du modèle joué par le pupitre de cors de l’Orchestre Philharmonique de Vienne). Les modèles historiques en sont par exemple les instruments de Leopold Uhlmann (1806-1878). Pour moi, cet instrument est un bon compromis qui permet de répondre aux exigences techniques élevées de ce répertoire, tout en correspondant à une sonorité historique, et en permettant de construire un pupitre de cors homogène quoique constitué de différents types d’instruments.
Gilbert Cami-Farras a utilisé un cor à pistons en fa (avec une branche d’embouchure fixe) d’Eduard Kruspe (Erfurt).
Georg Koehler, chef du pupitre de cor d’Insula orchestra (traduction : Nathan Magrecki)
Trombones – par Fabien Cyprien
La facture des trombones « romantiques » allemands est une évolution de celle des trombones baroques ou sacqueboutes. Le plus grand changement est un très fort élargissement du pavillon permettant un volume sonore adapté à l’agrandissement de l’orchestre symphonique naissant.
Les trombones utilisés dans La Nuit des rois sont des instruments de facture allemande :
- Trombone alto : copie des années 1860 ca. de marque Mönnich ;
- Trombone ténor et basse : trombones allemand C. A. Wunderlich, Sibenbrunn Vogel, arrondissement de Markeunkirchen, Vogtland, Saxe.
La facture des trombones « romantiques » allemands est une évolution de celle des trombones baroques ou sacqueboutes. Le plus grand changement est un très fort élargissement du pavillon permettant un volume sonore adapté à l’agrandissement de l’orchestre symphonique naissant.
En Allemagne à partir de 1841, les trombones alto, ténor et basse sont joués avec un pavillon très fin comme les trombones baroques mais plus évasés.
Le métal est très fin d’environ 0,2 à 0,3 mm, comme les sacqueboutes et les cors viennois, ce qui lui donne un son plus rond et doux dans les piano et très brillant dans les forte.
En France, l’épaisseur du pavillon est d’environ 0,5 cm ce qui lui donne un son plus clair dans toutes les nuances.
On trouve toujours la collerette sur le pavillon des trombones allemands, comme sur les sacqueboutes. Cela permet de renforcer le bord du pavillon contre les chocs, mais aussi d’empêcher des vibrations parasites dans passages forte car le pavillon est très fin.
L’envie d’élargir cet instrument est venu en 1841 de Leipzig, par le facteur Sattler. Ce sont les premiers trombones larges à être utilisés à l’orchestre du Gewandhaus de Leipzig, dirigé entre autres par Mendelssohn. Ils deviendront ensuite le modèle standard du trombone romantique germanique.
Ils sont toujours utilisés dans les grands orchestres allemands comme l’Orchestre philharmonique de Berlin, mais aussi américains comme celui de Chicago.
Fabien Cyprien, tromboniste au sein d’Insula orchestra
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