Fidelio / David Bobée
Rédaction : Cora Joris
Introduction
Solistes
Stanislas de Barbeyrac – Florestan
Sinéad Campbell-Wallace – Leonore
Christian Immler – Rocco
Sebastian Holecek – Don Pizzaro
Anas Séguin – Don Fernando
Hélène Carpentier – Marzelline
Patrick Grahl – Jacquino
Ensembles
accentus
Insula orchestra
Direction
Laurence Equilbey
Mise en scène et scénographie
David Bobée
Nicolas Girard-Michelotti, assistant mise en scène
Léa Jézéquel, assistante scénographie
Stéphane Babi Aubert, création lumière
Wojtek Doroszuk, création vidéo
Pour sa nouvelle création scénique, Insula orchestra renouvelle sa collaboration avec David Bobée, après le succès de La Nonne sanglante en 2018. Cette fois, ils livrent leur vision de l’unique opéra de Beethoven : Fidelio. Dans cette ode à la justice et à la liberté, la courageuse Leonore, travestie en homme, tente de libérer de prison son époux, emprisonné arbitrairement à des fins politiques, ici interprété pour la première fois par le vaillant Stanislas de Barbeyrac.
Fidelio
Julien Benhamou
Beethoven en dix points
Portrait de Beethoven
Joseph Karl Stieler - Wikimedia commons
1. Ludwig van Beethoven est un compositeur allemand de la fin du XVIIIème siècle et du début du XIXème siècle.
2. Il est né en Allemagne mais a vécu à Vienne, en Autriche, presque toute sa vie.
3. Il commence sa carrière comme virtuose du piano avant de se consacrer à la composition.
4. Avec Wolfgang Amadeus Mozart et Joseph Haydn, il représente le style musical viennois.
5. Il fait partie des derniers compositeurs de la période classique mais on le considère aussi comme l’un des premiers compositeurs romantiques.
Der Hohe Markt in Wien
Raimund von Stillfried - Wikimedia Commons
6. Il souffre de problèmes d’audition et devient sourd à l’âge de 27 ans.
7. Dans la plupart de ses œuvres, son style musical est tourmenté et dramatique.
8. Il compose neuf symphonies, dans lesquelles il agrandit l’orchestre et développe une puissance musicale qui inspire et impressionne tous les compositeurs du XIXe siècle.
9. Il compose également de nombreuses pièces pour piano, des œuvres de musique de chambre, des concertos et des œuvres vocales. Il compose un seul opéra.
10. Il est l’un des compositeurs les plus joués aujourd’hui, et certaines de ses œuvres sont très connues, comme la Symphonie n° 5, ou encore la Symphonie n° 9 et son hymne à la joie dans le dernier mouvement.
Petite histoire de l'opéra
A night at the opera
Carl Kahler - Artvee
L’opéra est un genre musical qui regroupe un orchestre, des chanteurs solistes et un choeur.
L’opéra est un genre musical qui regroupe un orchestre, des chanteurs solistes et un choeur. Il s’agit d’une oeuvre musicale et théâtrale, avec un livret qui met en scène des personnages, incarnés par des chanteurs solistes.
L’opéra est né en Italie, à la toute fin du XVIe siècle. Le premier opéra est Dafne, du compositeur italien Jacopo Peri, en 1598. Le genre se développe, notamment grâce au compositeur Claudio Monteverdi, et le chant prend de plus en plus de place : les airs se font plus virtuoses, et alternent avec les récitatifs. Les livrets opposent des éléments tragiques à des éléments comiques, avec la présence de la magie et du merveilleux dans l’histoire.
En France, le compositeur Jean-Baptiste Lully crée un style d’opéra français avec la tragédie lyrique. Les sujets tournent alors autour de la mythologie.
Au XVIIIe siècle, l’opéra se développe aussi en Allemagne notamment avec Wolfgang Amadeus Mozart et le genre du Singspiel. À cette époque, on distingue deux grandes catégories d’opéra : l’opéra seria, au caractère sérieux et noble, et l’opéra buffa, au style plus léger et aux sujets comiques.
Au XIXe siècle, les opéras prennent une dimension plus grande, avec un élargissement de l’orchestre. On peut citer comme exemple Carl Maria von Weber, Gioachino Rossini, Giuseppe Verdi, Charles Gounod, Jules Massenet…
Les sujets correspondent à l’idéal romantique de l’époque : le merveilleux et l’amour sont toujours présents, le héros torturé est au centre de l’intrigue, et la musique se fait plus expressive et grandiose.
Lady with Opera Glasses
Cyprián Majerník - Artvee
Le compositeur allemand Richard Wagner repousse les limites de l’opéra : il rassemble un orchestre de plus de cent musiciens et des chanteurs aux voix plus puissantes, pour des opéras qui durent plusieurs heures. Il compose notamment l’Anneau du Nibelung, un ensemble de quatre opéras inspirés de la mythologie germanique et nordique, dont la durée totale est de quinze heures environ.
Au XXe et au XXIe siècle, les compositeurs cherchent à développer le genre de l’opéra d’une autre manière, en rupture avec Wagner. Ils développent d’autres langages musicaux, et choisissent des sujets plus réalistes pour leur livret.
Comme dans une pièce de théâtre, un opéra se structure en plusieurs actes. L’opéra commence toujours par une ouverture instrumentale, juste avant l’Acte I, dans laquelle seul l’orchestre fait entendre les mélodies principales de l’oeuvre et donne le ton général (léger, dramatique…).
Les voix des solistes sont différentes selon les personnages. Les voix principales de l’opéra sont les suivantes : soprano (voix de femme aigue), ténor (voix d’homme moyenne), basse (voix d’homme grave). Traditionnellement, la voix de soprano incarne l’héroïne amoureuse, la voix de ténor le héros amoureux et la voix de basse le méchant ou le sage.
Beethoven et l'opéra
Fidelio
Moritz von Schwind - gallica.bnf.fr
Fidelio est l’unique opéra de Ludwig van Beethoven. En effet, le compositeur se consacre plutôt au genre symphonique : avec ses neuf symphonies, ou encore avec ses ouvertures Egmont ou Coriolan, il explore des voies nouvelles et marque un tournant dans l’histoire de la musique. Il agrandit l’orchestre, réinvente les formes musicales et développe une puissance expressive jamais atteinte auparavant. Beethoven compose également beaucoup pour le piano, en suivant les évolutions de facture de l’instrument, ainsi que pour des ensembles de musique de chambre.
L’histoire de son opéra Fidelio est pleine de rebondissements :
En 1803, alors qu’il compose des œuvres de grande ampleur, dans un style qu’on définit aujourd’hui comme « héroïque » (en référence à sa Symphonie n° 3 dite « Eroica »), Ludwig van Beethoven reçoit la commande d’un opéra : Joseph von Sonnleithner, alors directeur du Theater an der Wien (Théâtre de Vienne en Autriche), traduit en allemand le livret français Léonore ou L’Amour conjugal de Jean-Nicolas Bouilly et propose à Beethoven de le mettre en musique.
Le compositeur travaille à son opéra pendant deux ans, et le 20 novembre 1805, Leonore est créé. Cependant, les musiciens autant que le public réservent un accueil froid à l’œuvre, et la première est un fiasco.
Beethoven retravaille alors son opéra : il supprime un acte et remanie sa partition. L’année suivante, en 1806, la deuxième version de Leonore rencontre un réel succès. Mais Beethoven se dispute avec le directeur du Theater an der Wien, et les représentations de Leonore sont supprimées.
Huit ans plus tard, Beethoven reprend une nouvelle fois son œuvre et y apporte de nouveaux changements : l’opéra change de nom et s’appelle désormais Fidelio. L’œuvre telle qu’on la connaît et telle qu’on la joue aujourd’hui est créée le 23 mai 1814 et rencontre un véritable succès.
Fidelio
Nom
Fidelio ou L’Amour conjugal op. 72
Identité
Singspiel
Inventeurs
Ludwig van Beethoven (musique) sur un livret traduit en allemand par Joseph von Sonnleithner d’après Léonore ou L’ Amour conjugal de Jean-Nicolas Bouilly
Date de naissance
20 novembre 1805 (première version) ; 29 mars 1806 (deuxième version) ; 23 mai 1814 (troisième version).
Lieu de naissance
Theater an der Wien (Vienne, Autriche)
Langue
Allemand
Durée
2 heures environ
Structure
Ouverture et 2 actes
Effectif
2 flûtes – 2 hautbois – 2 clarinettes – 2 bassons – 1 contrebasson – 4 cors – 2 trompettes – 2 trombones – timbales – cordes – solistes – chœur
Personnages principaux
Florestan : prisonnier (ténor)
Léonore : femme de Florestan, se déguise en homme
et se fait appeler Fidelio (soprano)
Rocco : maître geôlier (basse)
Marcelline : fille de Rocco (soprano)
Jaquino : portier (ténor)
Don Pizarro : gouverneur de la prison (basse)
Don Fernando : ministre (basse)
L’argument
L’histoire se déroule en Espagne, au XVIIIème siècle. Florestan est emprisonné injustement pour avoir dénoncé les agissements frauduleux du gouverneur, Don Pizarro. Mais Léonore, sa femme, cherche à le faire évader : elle se déguise en jeune homme, se fait appeler Fidelio et se fait engager par Rocco dans la prison où est enfermé Florestan. La fille de Rocco, Marcelline, tombe amoureuse de Fidelio, au grand désespoir de Jaquino qui voudrait l’épouser. Don Pizzaro s’apprête à exécuter Florestan, mais Rocco et Fidelio parviennent à le protéger jusqu’à l’arrivée du ministre, Don Fernando, qui vient libérer les prisonniers sur ordre du Roi. Le gouverneur de la prison est enfermé et Fidelio révèle son identité : Florestan et Léonore fêtent enfin leurs retrouvailles.
Le livret s’inspire de faits réels : pendant la Révolution française, une femme se serait déguisée et aurait travaillé dans une prison afin de faire libérer son mari emprisonné. Le livret français original de Jean-Nicolas Bouilly, écrit en 1798, a donné lieu à l’opéra Léonore ou L’ Amour conjugal de Pierre Gaveaux. Le texte a ensuite inspiré le compositeur italien Ferdinando Paër qui compose son opéra Leonore ossia L’amore coniugale presque en même temps que la première version de Leonore Beethoven.
Fidelio
Julien Benhamou
Fidelio
Julien Benhamou
Signes particuliers
Fidelio est un Singspiel : Beethoven fait alterner la langue chantée et la langue parlée. Il conserve également l’esprit du Singspiel, avec des passages gracieux et légers, et des personnages parfois comiques comme Jaquino et Marcelline. Les récitatifs et les airs se succèdent, ponctués par les chœurs, et l’orchestre intervient de manière subtile, par petits groupes d’instruments. Mais la dimension bourgeoise et politique du livret se ressent dans la musique, et Beethoven compose dans Fidelio des pages dramatiques, tourmentées et puissantes. Les dialogues parlés se font plus rares dans l’Acte II, et laissent la place à la menace de l’exécution de Florestan : la deuxième moitié de l’œuvre se déroule dans les souterrains, et Beethoven souligne ce changement de décor et d’ambiance. L’orchestre joue un rôle important qui dépasse de loin la simple fonction d’accompagnement des chanteurs solistes. La musique propose des contrastes de nuances et se fait menaçante puis triomphante; on retrouve ici l’écriture symphonique de Beethoven, qui pose alors les bases du genre de l’opéra allemand.
Le troisième mouvement est un scherzo, c’est-à-dire une danse légère à trois temps. Mais Beethoven s’amuse et déplace sur les temps faibles les accents naturels de la mesure à trois temps. Le déséquilibre rythmique ainsi créé alterne, tout au long du mouvement, avec un deuxième univers musical qui fait la part belle aux bois ; flûtes, hautbois, clarinettes et bassons se passent la mélodie, accompagnés tout en délicatesse par les cordes.
Fidelio est un Singspiel : Beethoven fait alterner la langue chantée et la langue parlée.
Les ouvertures
À chaque remaniement de la partition, Beethoven compose une nouvelle ouverture. La numérotation utilisée aujourd’hui n’est pas chronologique : Leonore I, jamais jouée du vivant du compositeur, a été composée en 1807. Leonore II est la première ouverture, composée pour la création de 1805. Leonore III correspond à la version de 1806. Enfin, une nouvelle ouverture est composée en 1814 pour Fidelio ; c’est celle que la plupart des orchestres interprètent aujourd’hui.
Les quatre ouvertures présentent des caractéristiques communes : la lenteur, le mystère, l’incertitude, la menace laissent place à un tempo rapide, dans un caractère tantôt léger et gracieux, tantôt pesant et dramatique, tantôt vigoureux, fougueux et victorieux. Le silence joue un véritable rôle narratif et chaque ouverture s’achève sur le triomphe final, qui annonce à la fin de l’histoire.
Music Investigation - Fidelio
La mise en espace de David Bobée
Fidelio
Julien Benhamou
Dieu qu’il fait sombre ici !
Ô silence effroyable !
Tout est désolé autour de moi
Pour sa mise en scène, David Bobée a décidé de retranscrire l’ambiance sombre de l’opéra dans un décor représentant la cour fermée d’une prison, avant de s’engouffrer dans des cachots souterrains. Il voit dans Fidelio un environnement contraint, un système opaque au sein duquel personne ne peut plus reconnaître ni ses ennemis, ni ses alliés. Sa mise en scène met en exergue le sentiment de restriction omniprésent dans l’opéra, avec l’enfermement de Florestan ou bien le fait que Léonore soit une femme et soit obligée de se travestir pour secourir son époux.
Fidelio
Julien Benhamou
Dans la trappe au milieu de la scène, on peut voir Florestan qui croupit dans un cachot souterrain, martyr d’une vérité enfermée avec lui. Les prisonniers autour de lui sont tout aussi enfermés entre les blocs de bétons et la grille à l’arrière-scène, figurant les barreaux d’une prison.
« Tout l’espace est verrouillé, contraignant. Tout est obstacle. […] Pour évoquer cet univers carcéral où tout est empêchement et chaque personnage subit des entraves physiques ou sociales, j’ai choisi des matières évoquant l’autorité moderne et l’univers carcéral, bloc de béton et métal rouillé pris dans l’éboulement d’un monde effondré. » – David Bobée.
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