Chapitres
Grande Messe
en ut mineur
K.427
Les clés de l'œuvre
Date et lieu
Composée entre l’automne 1782 et l’hiver 1783, en grande partie à vienne ; créée vraisemblablement en octobre 1783 à Salzbourg.
Époque
Classique
Taille
Une heure ; et encore, c’est sans compter l’office religieux qu’elle était censée accompagner !
Dimensions
Voix solistes (SSTB), chœur mixte, orchestre avec orgue.
Signe distinctif
Laissée en partie inachevée par Mozart ; à moins que quelqu’un ne retrouve la fin du manuscrit dans son grenier…
Ce que nous aimons
Sa liberté (ampleur, variété des styles…) par rapport aux contraintes de la musique d’église salzbourgeoise.
Nous vous conseillons
L’oratorio Davidde Penitente (Le Repentir de David) K.469, pour lequel Mozart a réutilisé note pour note des pans entiers de sa Messe en ut mineur ; ou la surprise de redécouvrir une même musique sur un autre texte.
(…) comme preuve de la sincérité de mon serment, j’ai ici la partition d’une messe à moitié composée, qui attend d’être portée à son terme.
Expressions sans limites
Aimer, créer, prier en totale liberté. Voilà le bonheur chèrement acquis que Mozart célèbre avec la Messe en ut mineur, première pièce religieuse composée de sa propre initiative et totalement dégagée des exigences de son ex-patron, l’archevêque de Salzbourg. Toutefois, l’œuvre qui, à l’instar du Requiem, reste inachevée, pose aujourd’hui encore des problèmes de restitution.
D’après les différents types de papier de l’autographe, Mozart l’aurait commencée en 1782 : Kyrie et Gloria sont complets, le Credo est interrompu après Et incarnatus est et il manque des parties de cordes, seules les parties de vents du Sanctus sont de sa main et aucun autographe du Benedictus n’a été retrouvé.
De juillet à octobre 1783, Mozart et son épouse Constance séjournent à Salzbourg où l’on donne la Messe – des fragments du matériel des Kyrie, Gloria, Sanctus et Benedictus subsistent. En mars 1785, Mozart recycle lui-même ces pièces sous la forme de l’oratorio Davidde Penitente.
Ces différentes sources nécessitent donc d’arbitrer des choix de reconstitution. En outre, la mixité des styles et le découpage en multiples sous-parties peuvent justifier que Mozart n’ait pas achevé l’œuvre alors que l’Empereur Joseph II était en train de légiférer pour une simplification de la liturgie catholique et de sa musique – que reflète la sobriété du Requiem.
Solemn Mass in the Hofburg chapel
Jindřich Tomec - Artvee
Mais Mozart n’a pas encore accepté cette évolution et compose en interprète des textes. Tous les moyens d’expression lui sont donc bons selon la tradition du stile misto admise jusque-là par l’Eglise, qu’il élargit sans limite, profitant de sa totale liberté.
La dramaturgie musicale s’impose dès le premier accord du Kyrie, en mineur alors qu’il a toujours traité ce texte conventionnellement en majeur. Le tutti martelé sur la pulsation cardiaque des basses porte la figuration de la supplication avec les figures de catabasis (ligne descendante), aposiopesis/suspiratio (syllabes entrecoupées par les sanglots). L’invocation au Christ du soprano-solo amène la lumière diffractée par les larges intervalles ascendants symboles de la Résurrection.
La forme du Benedictus avec son développement fondé sur la déconstruction de l’exposition, telles les péripéties au théâtre, donne à partager l’angoisse de celui qui pénètre dans Jérusalem à quelques jours de sa Passion – ressenti soldé par la reprise de la fugue de l’Hosanna qui ramène la pleine confiance.
Cette luxuriance du chœur déployé dans sa dimension horizontale, à la manière des œuvres de Bach que Mozart vient de découvrir et qui le subjuguent, met en abîme l’expression de plénitude et de foi : la grande fugue du Cum sancto, la splendeur sonore du double-chœur du Sanctus, l’ampleur des cinq parties du Gratias…
Mais, par-dessus tout, Mozart donne la part la plus belle à la partie de soprano-solo composée pour Constance, particulièrement dans Et incarnatus est, où la jeune mère dialogue avec les bois, bergers de la crèche, en longs mélismes tout nimbés de tendresse pour celui qui vient de naître – l’enfant Jésus et le premier né du foyer Mozart – exprimant en une seule et même prière l’amour sacré et l’amour profane.
Florence Badol-Bertrand
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